Exposition de Gérard Fromanger au Centre Pompidou

Gérard Fromanger, cet artiste pop

Publié par arman - lundi 28 mars 2016, 09:04 | Voir les avis

contemporain moderne

Beaubourg présente jusqu'au 16 mai la rétrospective de Gérard Fromanger artiste bien vivant contemporain de Warhol, que l'on pourrait qualifier aussi de "pop". Son goût pour la narration d'une époque les années 60-70 sur des toiles tout en couleurs, termine de le classer dans la même catégorie. A découvrir.

L'art de Gérard Fromanger c'est peindre la toile "instantanée" d'une époque, "photographier" à la peinture à l'huile la société de consommation, les tensions sociales, les événements dans la rue des années 60-70.

Les scénes de la vie quotidienne ressemblent à nous méprendre à des photos noir et blanc qu'il sauve de la grisaille en en colorant certains détails dans un style très "pop", tels de jolis bonbon très (trop?) sucrés parfois... Pourtant les oeuvres de Fromanger ne sont pas des sérigraphies (impressions de photos) colorisées à la Warhol mais bien de vraies peintures au pinceau.

A y regarder de très près, la compostion de la toile ci-dessus (Florence, rue d'Orchampt - 1975 - Galerie Jeanne Bucher Jaeger, Paris) regroupe des flaques, des tâches grises aux nuances plus ou moins foncés. Les dégradés noir et blanc sont donc plus grossiers que sur une photographie mais aussi beaucoup plus amusants. Ils se complètent d'autant mieux avec les éléments colorés, très surpremants, les dalles qui égayent la promenade de Florence engoncée dans son manteau, cheminant le long de cette rue étroite.

Comme vous allez le voir d'autres couleurs que le noir et blanc peuvent servir de fond aux toiles de Gérard Fromanger. 

La Vie d'artiste - 1975 - Collection particulière

Violet de Bayeux - 1972 - Collection particulière

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Les deux tableaux ci-dessus ont en commun de superposer les cadres de façon étonnante.

Dans Violet de Bayeux, cette couleur particulière sert de fond à une scène constituée de différents plans peuplés de personnages à la silhouette surimprimée de couleurs. Au premier plan l'épaisse ombre noire du peintre nous invite à nous intéresser avec lui à ce qui se passe à travers le cadre d'une porte ouvrant sur la rue. Bien que l'artiste ait l'air de s'y intéresser également, une playmate de peep show sur des photos érotiques accrochées au mur, au beau milieu de la toile, n'est finalement qu'un élément du décor.

C'est une toile aussi intéressante qu'intrigante, où notre regard est attiré vers le fond par différents points situés à des profondeurs de champ distinctes, jusqu'au petit personnage en vert, et où l'on se raccroche à la couleur pour reconnaître justement les vrais personnages des faux comme la playmate en photo.

Dans La Vie d'Artiste, Gérard Fromanger se met  en scène en projetant une formidable scène d'intervention de CRS dans une prison des années 70. Les lignes obliques accompagnent de façon colorée la montée des flics et la révolte des taulards sur le toit. Du cinéma vérité pour cet autre cadre dans le cadre au récit spectaculaire.

Bastille-réseaux - 2007 - MNAM Beaubourg

Dans ce tableau plus récent, nous métropolitains semblons vivre au sein d'un plan de transports urbains dont les lignes ceignent nos anonymes existences et nous lient.

A mon seul désir - 1979 - MNAM Beaubourg

Ci-dessus c'est le tableau le plus abstrait de l'exposition, dans lequel Gérad Formanger tel un Dieu du cosmos se permet de taguer de couleurs notre planète bleue. Il la sillonne de fils méridiens zigzaguant et biscornus, la soigne, la panse à l'aide de touches en aplats aux différents styles, certaines pouvant passer pour des sparadraps géants. Deux ensembles de couleurs très jeunes, rouge-orange et vert-bleu, se marient avec bonheur sur ce A mon seul désir, grand format dans lequel l'artiste s'amuse beaucoup et éveille le sourire du regardant.

Bien sûr d'autres toiles ont provoqué notre enthousiasme : par exemple les figures rouges des passants dans le Paris des années 70 ont aujourd'hui une actualité frissonnante. La série des tableaux qui "partent en furmée", peints dans un moment de déception en trois dimensions à la manière de Roy Liechtenstein éveillent le sourire par leur jeu de trompe-l'oeil presque naïf. Le drapeau français qui saigne, dans le film-tract de Mai 68 réalisé avec Godard, est étonnant parce que sans l'exprimer par aucun mot il porte un message lourd et indicible.

Les portraits de ses amis intellectuels, Jean-Luc Godard justement mais aussi Michel Foucault, sont vivifiants grâce encore à l'usage des lignes colorées. Gérard Fromanger est l'artiste pop qui s'inscrit le plus dans notre époque, et ce volontairement. Une exposition à Beaubourg qui ravit, d'un artiste moderne vraiment intéressant.

Pas d'avis pour l'instant.
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