La collection du Tokyo Bridgestone Museum of Art

Collectionneur du Soleil Levant

Publié par arman - mardi 15 août 2017, 15:01 | Voir les avis

moderne contemporain classique

Jusqu'au 21 Août, le Musée de l'Orangerie présente une exposition exceptionnellement dense composée de tableaux provenant du Musée Bridgestone de Tokyo au Japon. De Renoir à Paul Klee elle comprend de nombreuses et superbes toiles des plus grands artistes modernes, mais compte également quelques chefs-d'oeuvre de grands peintres japonais encore méconnus.

Le musée est fondé par l'homme d'affaires japonais Shojiro Ishibashi en 1952 pour abriter la collection d'art occidental qu'il commence à réunir à partir des années 1930. Parmi les oeuvres se trouvent des toiles peintes par des artistes japonais convertis à l'Impressionnisme et à l'Art Moderne.

La Peinture japonaise

Dans la première salle de l'exposition consacrée justement aux peintres japonais modernes, l'on découvre avec étonnement le grand talent de Takeji Fujishima (1867-1943).

Dans Réminiscence de l'ère Tempyo ci-dessus, du haut vers le bas seuls le visage et l'avant-bras gauche de cette geïsha semblent se détacher du décor, insufflant mouvement et vie à cette belle mais mutique personne. Fujishima magnifie ici la peinture décorative.

Eventail noir - 1909 - Takeji Fujishima

Nature morte au chat - 1940 - Léonard Foujita

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Rappelant les portraits de Berthe Morisot peints par Manet, le visage aux reflets bleus de cette femme à l'éventail, en apparence fragile, est étonnament double.

Dans la toile pleine d'humour de Tsuguharu Fujita, dit Léonard Foujita (1886-1968), le chat entêté dans son affrontement personnel avec l'oiseau, ne peut se laisser tenté par les autres victuailles à porter de patte.

Naturalisé français, Foujita fait partie de la célèbre Ecole de Paris composée d'artistes venant du monde entier qui se lancèrent à partir des années 1910 dans l'aventure de l'Art Moderne, et qui avaient Cézanne comme maître et Picasso comme chef de file.

Les Impressionnistes

Le Musée Bridgestone possède une collection d'oeuvres impressionnistes de premier ordre. Sont présents des tableaux de Caillebotte, de Renoir (dont l'un montre les façades aux nuances ensoleillées et pastel de Cagnes), Monet, Manet (un autoportrait plein de résolution et de défi), Degas (des danseuses anonymes et solitaires s'unissent pour l'achèvement d'un même effort), Pissarro et Sisley. Il semble ainsi qu'aucun des membres du plus grand courant pictural depuis la Renaissance ne manque à l'appel, attestant du goût pour l'art occidental de certains collectionneurs visionnaires comme Ishibashi.

De toutes les oeuvres impressionnistes celles de Claude Monet (1840-1926) sont encore parmi les plus poétiques et brillantes.

L'inondation à Argenteuil - 1873 - Claude Monet

Belle-île, effet de pluie - 1886 - Claude Monet

Nymphéas, temps gris - 1907 - Claude Monet

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Les feuillages des troncs inondés sont des nuages bruns qui rappellent l'eau boueuse et troublée qui déborde sur les rives d'Argenteuil.

Alors que la pluie qui tombe en oblique sur Belle-Ile voile les rochers au loin, les remous blancs de l'eau turquoise rafraîchissent nos joues et ravigorent le regard. 

Tandis que les peupliers se reflètent sur la surface de l'eau les nénuphars flottent comme des nuages dans le ciel au soleil couchant. 

Les Peintres Modernes

Le Musée japonais compte également dans sa collection des toiles de Gauguin, Matisse, Bonnard et surtout les chefs-d'oeuvre ci-dessous de Cézanne, Picasso, Henri Rousseau et Paul Klee.

Montagne Sainte-Victoire et Château Noir - 1906 - Paul Cézanne

Saltimbanque aux bras croisés - 1923 - Pablo Picasso

L'herbage - 1910 - Henri Rousseau

Ile - 1932 - Paul Klee

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A travers l'embrasure laissée ouverte par le feuillage, donnant sur un relief aux milles facettes souvent verdoyantes, Cézanne fait briller son château cubiste comme un oiseau doré sur son nid couvé par la Montagne Sainte Victoire.

Les traits du saltimbanque de Picasso sont si finement soulignés et dessinés que son visage en attitude réflexive ressemble à celui d'une sculpture. Son corps qu'épouse un justaucorps vermeille maintient pourtant une position détendue et naturelle, les bras croisés. En détachant le buste du reste du corps le châle blanc accentue même le trouble : est-ce le buste qui finalement devient peu à peu humain ou le beau jeune homme qui se pétrifie dans son attitude ?

Le Douanier Rousseau peint un pré peuplé de formes compactes parmi lesquelles des vaches prennent une importance disproportionnée notamment face à l'homme. Même les peupliers qui dépassent la haie des arbres ne sont plus que de simples flammes immobiles et sans envergure, dépourvues de toute l'ampleur dont jouit le trapu au milieu du pré, feuillu comme un buisson. Rousseau veut nous retenir sur le plancher des vaches et avec son humour poétique nous indiquer que c'est là que se trouve le bonheur.

Sur une infinité de points détachés les uns des autres et collés sur la toile Paul Klee peint l'idée d'une île, son relief et les rayons et les couleurs de son soleil couchant. Paysage abstrait composé de montagnes aux lignes douces dont nos yeux aimantés suivent les boucles heureuses, dans l'air chaud du couchant (nuances rouges) qui semble flotter sur une mer imperturbable et calme (nuances bleues).

L'exposition dédie également la dernière salle aux peintres contemporains Soulages, Zao Wou-Ki et Pollock. C'est décidément l'une des plus belles expositions à voir cet été à Paris.

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